Le domaine Didier Dagueneau, fondé en 1982 et réputé sur la scène internationale pour ses grands sauvignons, n'a pourtant pas connu des débuts faciles, le public n'adhérant pas aux méthodes de vinification non traditionnelles du propriétaire, essentiellement fondées sur l'intuition. A force de détermination, ce dernier a fini par convaincre les amateurs et les professionnels de la valeur de ses pratiques. Le secret de cette réussite réside avant tout dans le caractère incroyablement consciencieux de l'homme, et dans son aptitude à rester « à l'écoute du vin » pendant toute la phase de vinification puis d'élevage. Le travail de la vigne en lutte raisonnée, la pratique de l'ébourgeonnage pour maîtriser les rendements, la récolte entièrement manuelle et la trie draconienne des raisins contribuent aussi très largement au succès du domaine, sans oublier une équipe technique de premier ordre. Au chai, les vinifications se font avec les levures sélectionnées dans le vignoble du domaine, les élevages sur lies sont longs et sont complétés d'un élevage sous bois millimétré et en grands volumes. Depuis le décès accidentel de Didier Dagueneau, en 2008, c'est son fils Benjamin qui assure brillamment la relève. En janvier 2016, Louis-Benjamin Dagueneau a même été élu "Vigneron de l'année" par La Revue du vin de France.

Le Maudit est un sauvignon moelleux produit par Didier Dagueneau en 1990 en quantité minuscule. A l’époque l’agrément lui avait été refusé, le vin ne représentant pas le style de l’appellation Pouilly-Fumé selon les autorités. Le vigneron avait alors embouteillé cette cuvée déclassée en vin de table en bouteilles de 50 cl, destinées à être offertes aux amis de passage. Il l’avait baptisée « Le Maudit ». Plus de trente ans plus tard, ces bouteilles introuvables ont atteint un statut culte. Elaborée avec la méticulosité propre au domaine, elle a bénéficié de soins attentifs dans les vignes comme à la cave : des vendanges par tries successives pour sélectionner seulement les baies parfaitement mûres et saines, un pressurage direct et une fermentation en cuves inox ou barriques anciennes, sans malolactique. Le vin a ensuite bénéficié d’un long élevage sur les lies.
Pour la dégustation, il demande un peu d’aération préalable et révèle alors une robe dorée, un nez évolué d’amande, de miel et de poire, suivi d’une bouche suave, à la matière souple et onctueuse. La finale fait preuve d’une belle persistance. A ne pas manquer.